Les derniers arrivages à la SAQ vous font de l’œil ?
Permettez que je leur tire les lièges du nez pour vous aider à mieux les circonscrire.
Qu’ils soient blancs, rosés, oranges, clairets, rouges profonds
ou toutes les couleurs de l’arc-en-ciel
Qu’ils soient bios ou pas bios
Naturels ou surnaturels,
Je vous les livre sans autres préjugés que celui qui se nourrit à même l’intégrité et l’émotion qu’ils inspirent.
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Moins de 20 $
La Croix d’Aline 2022, Domaine La Croix Sainte-Eulalie, Saint-Chinian, Languedoc-Roussillon, France (18,60 $ - 896308)
Il est réjouissant le fruité en Languedoc-Roussillon. Pas à se plaindre du soleil il est vrai mais difficile tout de même à se distinguer parmi l’immensité du vignoble planté où chaque parcelle joue de sa propre personnalité. Les vins qui en sont issus respirent la terre, la roche, la racine et la garrigue avec tout ce que la biodiversité locale peut y ajouter, telle un fourre-tout que seul le paysan, le vrai, sait reconnaître. Nous sommes ici au pays des grenaches noirs et des syrahs enquiquineuses qui n’étalent sans doute pas leurs suffisances sur les tables parisiennes comme les premiers grands crus exceptionnels de ce monde mais qui savent régaler, le plus honnêtement du monde sur un bon pâté de campagne, même s’il n’est pas visité par Chateaubriand. Le fruit a ici de l’éclat dans sa simplicité, de la générosité et de la fraîcheur dans ses modestes intentions. Toujours bon !
(5) **1/2
Le canon
Chante Coucou 2020, Domaine Elian Da Ros, Côtes du Marmandais, France (40 $ - 12723142)
Dans ce millésime de haute maturité, cabernet, malbec, merlot et syrah ont décidé d’un commun accord de faire une confortable sieste dans un canapé aux tanins si riches et moelleux qu’il est à parier que leurs rêves respectifs soient d’une insoutenable décadence. Lush and posh diraient ici les anglosaxons ! Ces cépages à l’évidence s’entendent comme larrons en foire et leur assemblage pour part égale témoigne du doigté du vigneron. La robe rubis juvénile et profonde annonce déjà un bouquet porté avec beaucoup d’ampleur (épices, cuir, écorces, sous-bois, mûre…) alors que la bouche, peu acide mais pas lourde pour autant, est presque grasse tant les tanins sont lisses et enveloppés. Longueur appréciable. On se fait plaisir ici et maintenant sur un braisé. Pas besoin de l’acheminer en cave ! Le servi rafraîchi dans un verre Riedel « Veloce » pour cépage Cabernet/Merlot.
(5) **** ©
Le rosé
Juan Gil Rosé 2023, Jumilla, Espagne (24,95 $ - 15312007)
Du petit verdot et de la syrah. Vous avez bien lu. Mais pas autant que vous ayez bu. J’aurais compris « garnacha » mais « petit verdot », vraiment ? Le truc c’est que ça marche « du feu de Dieu » comme le disait avec son énergie contagieuse la belle Agnès de Frontignan. Le caractère y est, hautement affirmé, avec ce ton singulier en bouche, à la fois tonique et fort dense sur le plan fruité. Bref, pas un rosé bio pour mauviette mais un solide rosé pour une table où la paëlla et les tapas de choix sont à l’honneur.
(5) ***
Le blanc
Bourgogne « Le Duché » 2022, Moillard, Bourgogne, France (22,75 $ - 13360005)
C’est pas du Montrachet mais comme le veut l’expression parisienne : « Ça le fait ! ». Et ça le fait pourquoi ? Parce que ça goûte le bon chardonnay, à la fois rond, bien frais et onctueux avec ce retour de balançoire fruitée en bouche qui invite à s’y mouiller encore et encore. Sans perdre l’équilibre. Bref, bouder son plaisir à ce prix c’est pas bon pour la santé. Excellent sur le sandwich au poulet mayonnaise.
(5) ***
Le rouge
Château d’Aqueria 2022, Lirac, Rhône, France (24,95 $ - 15295614)
Ce cru des Côtes du Rhône creuse le fruité en profondeur, comme si les épaisseurs multiples qui le compose ne cessaient d’apporter du vin au moulin du fruité et des notes épicées qui en prolongent le goût. Des grenaches évidemment mais aussi du mourvèdre et de la syrah pour le structurer sans pour autant trop le raffermir. Un solide rouge, tout de même puissant, franc et sincère et dont la trame tannique le guide tout naturellement vers un bon sandwich au porc fumé effiloché.
(5) *** ©
Le bio
Ad Libitum 2022, Coralie et Damien Delecheneau, Grange Thiphaine, Touraine, France (26,80 $ - 14093228)
Le couple Delecheneau sait très bien qu’il est peu probable que l’on ne boive qu’un seul verre de leur rouge. Astucieux il est vrai mais c’est la réalité. « À volonté ! » (L’exclamation est de moi) est le message planté au cœur de l’étiquette. Car la gourmandise proposée est diablement sérieuse ici. Du gamay, du côt et du cabernet franc non seulement au sommet de leurs complicités respectives mais de leurs expressions éclatantes rehaussées par tout le travail opéré en biodynamie derrière. Un rouge tonique et plutôt léger, avec ce qu’il faut de tanins mûrs et savoureux pour s’attabler longuement… à volonté ! Servir frais après une bonne heure de carafe.
(5) ***1/2 ©
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Autres gourmands de vigne encore disponibles
Le Paria 2023, Vin de France, France (18,85 $ - 14029162)
La Maison Ventenac qui embouteille ce grenache noir n’est certes pas à côté de ses pompes lorsqu’elle affirme que le grenache noir est ici à sa place, dans cette bouteille. On en apprécie le fruité sapide et gourmand, savoureux et passablement festif. Un rouge bio à l’équilibre parfait dont il est difficile de se lasser. Le rafraîchir évidemment (ça vous le savez je sais) avant de le servir sur un shish kébab pas chiche du tout.
(5) **1/2
Hautes Pistes “Pinot Noir” 2022, Aubert & Mathieu, Pays d’Oc, France (19,70 $ - 15082758)
Les cuvées en blanc comme en rouge de ce dynamique duo sont à la fois simples, gourmandes, équilibrées, bien fraîche et hautement savoureuses. Elles ont du caractère et tiennent bien en bouche tout en instillant un plaisir sain de boire franc. À servir frais sur toutes ces brochettes marinées que votre BBQ aura la bienveillance d’accepter sur son grill.
(5) **1/2
Gavi di Gavi 2022, Fontanafredda, Piémont, Italie (22,40 $ - 15247524)
La qualité d’ensemble des vins de cette maison est aujourd’hui d’un niveau très enviable compte tenu des volumes de production. Meilleur à mon sens qu’avant le tournant du millénaire. Cépages et appellations sont circonscrits avec intégrités et les vins ne manquent pas d’élégance. Surtout que les prix demeurent très corrects. Ce cortese bio en est une preuve de finesse et d’acuité fruitée. Nuances florales, à peine citronnées déclinées sur une bouche légère, articulée, sensible et tonique. Un cépage à découvrir !
(5) ***
Sierra di Tolono 2022, Rioja, Espagne (23,85 $ - 15151186)
Sandra Bravo nous propose un tempranillo bio qui dès la mise en verre explose de fruits noirs et de grain de café fraîchement torréfié, assurant dans la foulée beaucoup de tonus, d’expression et de caractère. C’est corsé il est vrai mais on y revient rapidement pour la sapidité de ses tanins qui s’installent sans pour autant abrutir le palais. Les côtes levées lui ont donner ici l’occasion de faire le paon.
(5) *** ©
Bourgogne Rouge « Le Duché » 2022, Moillard, Bourgogne, France (26,50 $ - 15266531)
Inutile de chercher midi à quatorze heures. Quand on veut un pinot noir, on ne veut pas un succédané de pinot noir. On tient à ce goût de cerise un rien herbacé, souple et vivant, même simple d’expression comme le cas qui nous occupe ici. Après c’est de savoir si on préfère un Chambolle-Musigny « Les Amoureuses » ou un Vosne-Romanée « Cros Parantoux » pour déjeuner. Pour la table toute simple qui est la mienne, ce pinot fait le boulot ! C’est frais, pourvu de légers tanins et doté de caractère. Le servir frais sur une belle charcuterie maison.
(5) ***
Lou Pigna 2023, Bastide de la Ciselette, Bandol, France (27,55 $ - 13184056)
Le temps sec et ensoleillé, la roche chaude qui affleure, le mistral qui porte au loin le chant des cigales et le mourvèdre qui chante le tout avec une indéniable force de caractère. À Bandol, le rosé n’est pas un jaja de buvette mais un prince qui s’attable, mange des langoustines et fait la conversation aux dames en toute civilité. Ce Lou Pigna discours bien, avec un fruité mûr, dense et bien épicé, il a de la tenue et une fraîcheur remarquable. Et on n’en est pas encore au dessert !
(5) ***1/2 ©
Rosso di Montalcino 2022, Argiano, Toscane, Italie (34,25 $ - 15343866)
On ne badine pas avec le sangiovese grosso de Montalcino. Plus impérial à ce qu’il me semble qu’un Chianti par exemple, même s’il n’est pas issu de la cuisse du Grand Vin Brunello. Il y a tout de suite ici une mâche « constrictante », qui contracte et qui vous cale bien le palais avec ses tanins fruités mûrs et abondants qui tiennent longuement en haleine. Un foie de veau ou une escalope de veau forestière sauront sans doute lui calmer les ardeurs.
(5+) *** ©
Jurançon Sec « La Part Devant » 2022, Camin Larredya, Sud-Ouest, France (38,75 $ - 12233434)
Quelle jolie pépite de vin blanc bio ici ! Que de caractère aussi. Une magnificence fruitée dont le rayonnement en bouche s’opère avec tout autant de réalisme que d’exotisme, d’acuité que de grandeur assumée. Jean-Marc Grussaute cisèle avec art et doigté petit et gros manseng ainsi que petit courbu qui irradient ici avec un bonheur enviable une bouche déjà comblée en raison d’une acidité fine qui en décuple les textures. L’impression de croquer pour mieux fondre dans une pâte de fruit aux nuances de pomme, de poire, de coing et de mirabelle que sauront dynamiser une matelote de poisson au safran. Un vin blanc de haute sève accouché par un vigneron inspiré qui aime tout autant la vie que la vie dans son vin. Un modèle à suivre !
(5+) **** ©
Cabernet Sauvignon 2021, Alexander Valley Vineyards, Alexander Valley, Californie, États-Unis (40 $ - 15326708)
Un internaute que je ne nommerai pas, visiblement un amateur de vin, semble dénigrer plus souvent qu’à son tour le cabernet sauvignon de la maison californienne Caymus. Si je ne suis pas particulièrement fan de cette maison visitée il y a plus de 25 ans maintenant avec ce souvenir d’un rouge dense, compact, peu nuancé, « sucré » et cavalièrement boisé, force est tout de même d’admettre qu’il correspond à un profil de goût qu’affectionnent bon nombre de consommateurs dont certains sont d’indécrottables buveurs d’étiquettes. En matière de vin, chacun ses goûts ! Ce détour pour vous parlez de ce cabernet sauvignon que j’apprécie pour ma part pour sa vitalité, son impeccable tranchant fruité et son boisé savamment ajusté. Le type de vin que je range au niveau de mes plaisirs coupables parce qu’il « fait la job » sur votre Ti-bone tout aussi carné que caramélisé mais aussi parce qu’il accroche et charme par la générosité de son fruité. Pas nécessairement très profond mais l’intégration des éléments est tout simplement parfaite. Avec une belle longueur en bouche en prime. Recherchez les vins de cette région (Alexander Valley) pour leur tonus naturel et leur proposition fruitée bien circonscrite. À ce prix, l’affaire est belle!
(5+) ***1/2 ©