Vienne possède ses vignes intramuros, Paris a les siennes du côté de Montmartre mais aussi dans quelques pavillons hospitaliers disséminés dans la Ville Lumière et Venise recèle de pépites elles aussi dont celles mises en terre par les Franciscains qui, dès 1534, installaient leurs pénates dans ce qui allait devenir la Chiesa Francesco della Vigna, seconde plus grosse église de la Sérénissime. Et Montréal ? Hormis quelques échalas trônant en rangs bien serrés dans les cours exiguës de portugais et d’italiens encore nostalgiques de leur pays natal, que de la vigne sauvage s’enroulant autour de poteaux de téléphones pas foutus même de fournir un sirop de poteau de qualité. Et si on plantait des vignes en terrasses sur les flancs du Mont-Royal avec exposition sud-sud-ouest ? Ce pourrait être aussi du côté du Lac des Castors à 233 mètres au-dessus du plus bas du Bas du Fleuve ou encore, pour faire insulaire, sur l’Île Sainte-Hélène qui mérite bien autre chose qu’un circuit de Formule 1 !
Imaginez seulement, quelques ouvrées, ares ou hectares dont les fruits taillés, récoltés et vinifiés par une jeunesse en mal de vivre et de repères sont embouteillés pour être ensuite commercialisés afin de soutenir mais aussi de donner du sens à de nombreuses causes sociales telles l’intégration au marché du travail, au logement, à la santé mentale ou autres. Ce ne sont pas les causes qui manquent ! Une cuvée Jean le Baptiste dans une bouteille aux armoiries de la ville de Montréal y verrait le jour, en blanc, rosé, orange et rouge à partir de nos hybrides d’ici dont la floraison autour du 24 juin serait le prétexte tout indiquer pour chanter le Pays.
Tout cela roulait dans ma tête en savourant à Venise la cuvée Harmonia Mundi mise en bulle par le groupe Santa Margherita et dont la production confidentielle (un peu plus de 1000 flacons) n’est pratiquement dégustée que dans les palaces vénitiens. Si elle n’est pas un prosecco pour des raisons évidentes, cette cuvée où malvasia et glera ont co-fermenté préalablement sur lies pendant six mois s’en rapproche par l’esprit, suggérant sur une base peu dosée d’affriolantes nuances de melon, de poire et de brioche sur fond de bouche vivante et satinée. La dégustation de cette élégante cuvée avait lieu après la visite du minuscule vignoble de moins de un hectare jouxtant les deux cloîtres de la célèbre église où les Franciscains ont toujours leurs quartiers. Il faisait bon, après des kilomètres de dédales « minéralisés » serpentant les rues étroites de la célèbre ville d’eau, de s’asseoir sous l’olivier au cœur du vignoble, soûlé par tant de verdure et de paix
Il se trouve, parmi la centaine de proseccos offerts à la SAQ et les 100 millions de cols produits dans l’appellation Prosecco (et dont le Conegliano Valdobbiadene DOCG en est la crème qualitative), cet autre classique de la maison Santa Marguerita, un peu plus dosé il est vrai mais tout aussi pourvu en fruité, avec de jolies notes florales à la clé. À 21,25 $ (12509154 - (5) **1/2), le Prosecco Valdobbiadene Superiore est tout simplement ce rendez-vous galant avec lequel l’émotion se jumelle à la pression fine du flacon pour installer de jolis diamants dans les yeux de la belle. Ou du beau, ne soyons pas sexiste ! Léger, bien frais et tout ce qu’il y a de vivant, voilà l’apéro (à servir en spritz ou non) à décliner sur des gougères ou autres feuilletés aux champignons et noix de St-Jacques.